Lucile B - 24 ans
- Prénom : Lucile
- Année de naissance : 1990
- Age des premières règles : 12 ans
- Age des premières douleurs liées à l’endométriose : 12 ans
- Age auquel le diagnostic a été posé : 23 ans
Si je n'étais pas aussi égoïste, je le quitterai...
C'est la première chose à laquelle j'ai pensé lorsque le diagnostic a été posée. Depuis que nous sommes en couple, mon ami ne m'a jamais connu pleinement satisfaite sexuellement. Lors de ma première fois, avec lui, la douleur était déjà présente. Mais étant ma première fois et tendue, pour l'un comme pour l'autre, cette douleur était normale. Seulement, les douleurs ont continué et se sont même accentuées.
Ça a été un coup dur énorme de savoir que je ne pouvais plus l'accepter en moi sans ressentir une douleur absolument insupportable. Et en pleine excitation, il a fallu tout arrêter. Je me suis mise à pleurer, j'étais inconsolable et ne cessais de lui demander pourquoi je n'étais pas normale, pourquoi je n'étais pas comme les autres femmes, pourquoi je ne pouvais pas ressentir simplement du plaisir et non pas ce mélange de plaisir et de douleurs violentes. Pourquoi n'étais je tout simplement pas capable de le rendre heureux...
Nous avons décidé de consulter mon médecin pour avoir une contraception hormonale. Nous pensions que j'étais allergique au latex. Avec la pilule, nos rapports sexuels se sont un peu améliorés. Cependant, le simple fait de jouir ne m'était pas toujours accessible tellement la douleur prenait le pas sur le plaisir. Au bout de quelques semaines, mon ami réussi enfin à me persuader qu'il me fallait prendre un rendez-vous chez la gynéco et là, le verdict tombe : Endométriose avec endrométrome et même un polype vaginal.
J'ai eu de la chance dans mon malheur. Dès ma première consultation avec ma première gynéco, cette dernière a trouvé immédiatement de quoi je souffrais. C'est inquiétant lorsque votre gynécologue vous annonce qu'en général "Les femmes souffrent ou d'endométriose ou d'endométrome... Mais vous vous avez les deux et les polypes à votre âge (23ans), ce n'est pas normal...". Le polype a été envoyé à un laboratoire et pendant trois semaines, je me suis levée tous les matins avec une épée de Damoclès au dessus de la tête : Avais je un cancer ? Lundi. Le résultat des analyses tombe : RAS. Quel soulagement !
Mais je garde quand même en tête que ma grand-mère a toujours eu des problèmes gynécologiques. Elle a eu des difficultés à avoir son seul enfant, a souffert d'une grossesse difficile, a développé un cancer du foetus sur son deuxième bébé... Pour finir avec un cancer. Et si je suivais la même voie ? Et si tout était héréditaire ? Je souffre déjà d'une double maladie et si mon destin était de développer pire encore ? Mais pourquoi ne puis-je pas être normale ? Pourquoi ne puis-je pas avoir une vie sans difficulté ? Après toutes les souffrances que j'ai déjà enduré, n'aurais je pas pu vivre tranquillement maintenant?
Depuis le rendez-vous avec la gygy, j'ai un traitement à suivre. Un ovule vaginal tous les soirs pendant 6 mois. C'est contraignant mais je sais que ça pourrait être bien pire. Depuis, mes règles sont toujours douloureuses, parfois à la limite de l'insupportable mais nos rapports sexuels se sont un peu améliorés mais pas sans douleurs. Je n'ai plus eu à repousser mon ami. C'est un soulagement. Mais malgré ça, je ne me sens pas comme une femme normale pour autant. J'ai toujours mal et la jouissance n'est pas toujours au rendez-vous.
J'ai su que cette maladie pouvait être une cause de stérilité. Mon ami voudrait un enfant. Est ce que je pourrais le lui donner ? Est ce que je pourrais faire le plus beau des cadeaux à cet homme qui m'a tant soutenu et consolé lors de mes longues soirées de déprime et de baisse de moral ? Il fait tellement preuve de patience envers moi, ne me reproche jamais rien hormis d'être si dure envers moi-même. Pourrons-nous un jour créer un petit être rien qu'à nous ? Et si non... J'ai eu envie de le quitter pour lui offrir cette chance avec une autre femme. J'ai éprouvé le désir de le débarrasser du fardeau que je représentais. Mais il est tellement amoureux et semble pleins d'espoirs...
J'ai été égoïste, et nous sommes toujours ensemble aujourd'hui. Deux personnalités, deux corps et deux personnes distinctes qui se battent ensemble contre cette maladie. L'endométriose n'est pas seulement difficile à vivre pour moi, elle l'est peut-être encore plus pour lui. Je souffre et cela malgré toutes ses précautions et toute la bonne volonté dont il fait preuve. Moi j'ai peur de ne pas le rendre pleinement heureux et lui a peur de me voir triste, de me voir avoir mal et d'être faible physiquement. Il se sent impuissant face à mes problèmes de santé et moi inquiète de le voir ainsi.
Toutefois nous sommes forts ensemble ! Je peux le dire, oui, malgré cette maladie j'ai de la chance : Je ne suis pas seule.