Leila - 27 ans

  • Prénom OU Surnom : Leila
  • Année de naissance : 1986
  • Age des premières règles : 13 ans
  • Age des premières douleurs liées à l’endométriose : 13 ans
  • Age auquel le diagnostic a été posé : 19 ans
  • Année du témoignage : 2013

 Bonjour, je m’appelle Leila et j’ai 27 ans.

Aussi loin que je me rappelle, j’ai toujours eu très mal au ventre. J’ai toujours été « maigre » malgré l’appétit et la bonne nutrition. Toujours cernée, avec une tête et un corps fatigué, essoufflée au moindre effort.

A l’apparition de mes règles, je ne savais pas s’il était normal de souffrir autant, et je n’osais pas trop en parler à mes parents jusqu’à ce que ces douleurs deviennent invalidantes. 

Mon médecin traitant de l’époque me disait que tout était normal, et disait à mes parents que je faisais du cinéma pour ne pas aller à l’école. J’ai été suivie par 2 psy en 3 ans, qui ont tout deux conclus que je souffrais de mythomanie, et d’un besoin d’attirer l’attention et de me faire plaindre, surement à cause de mon petit frère qui accaparait toute l’attention de la famille.

Persuadée que je n’allais vraiment pas bien, j’ai rencontré des médecins et des gynécologues dans le dos de mes parents, jusqu’à ce que ma gynéco appelle ma mère pour le lui dire. Cela a été la descente aux enfers. Ma mère ne me croyait plus, m’accompagnait à l’école (jusqu’à l’age de 18 ans), faisait des visites surprises devant mon école, me mettait des couvres feu pour être sûre que j’étudie bien. Mes passages aux urgences ont été pris comme de la folie par ma famille: « elle va jusque là?? » . Toujours rien, c’est dans ma tête, je suis folle, désespérée…

Je supplie ma mère de me croire. 

J’ai 19 ans, je suis en examen de maths du bac, et mon pantalon se recouvre de sang et je vomie sur ma table avant de tomber dans les pommes. Je me retrouve à l’hôpital et on appelle ma mère. Elle voit ce sang, ma tête, mon désespoir. Elle prend les choses en mainz. Nous allons voir une gynécologue conseillé par l’interne de l’hôpital qui me fait une ordonnance pour une cœlioscopie diagnostique. Elle nous propose d’aller à l’hôpital Cochin spécialisé dans l’Endométriose. Je ne sais pas ce que c’est… j’appréhende. Après de nombreux examens (irm, scanner..) le Dr L*****D qui n’exerce plus dans cet hôpital à présent, m’assure qu’il ne trouvera rien en coelioscopie, mais l’ a fait quand même. A mon réveil  il s’excuse. Je faisais une hémorragie interne. J’ai de l’endométriose dans le cul de sac de douglas et sur les ligaments utéro sacrés.  Je suis mise sous ménopause artificielle pendant trois mois, et je suis censée être guérie. Mes douleurs continuent, de plus en plus violentes mais d’après le chirurgien c’est la mémoire du corps, rien de plus.

Je vis avec mes douleurs, jusqu’à mes 23 ans où je tombe enceinte. C’est le bonheur, puis le cauchemar. Je suis maman, mais je ne peux pas me lever pour m’occuper du petit. Après l’accouchement je saigne 5 mois en continue avec des douleurs violentes, et des spasmes indescriptibles. Je n’arrive plus à aller aux toilettes, et mon ventre gonfle, gonfle, gonfle, alors que je passe de 60 kg à 48 kg.en moins d’un mois…

Je suis désespérée, je ne peux pas retourner travailler car je ne peux plus marcher. Mon mari prends deux mois de vacances pour m’aider. Chez la pédiatre pour le petit, je m’effondre en larmes en lui expliquant mes douleurs et mon incapacité à m’occuper du petit. Elle me prescrit cerazette en continue pour éviter les saignements. C’est le bonheur, je n’ai plus de douleurs, jamais. Je peux enfin m’occuper de mon fils, aller travailler, avoir une vie normale, et me marier. 

En février 2013, je suis au travail. Je bois un café avec mes collègues pendant notre pause. J’ai une douleur comme une brûlure dans le bas du ventre, et je n’ai pas le temps de réaliser que je me suis fais caca dessus. Je cours aux toilettes, c’est mélangé à du sang. Je me mets à trembler et je ne sais plus quoi faire. Je jette ma culotte à la poubelle, rembourre mon pantalon de papiers toilettes, et je fais le mur… Je n’en parle pas à mon mari car j’ai honte et invente une violente gastro.

Le lendemain, je retourne au travail, avec un change dans mon sac, et une serviette pour retour de couche sur moi. Je suis en réunion et je ressens cette brûlure. Je panique, je suis entourée de 12 personnes, et je sais ce qu’il m’attend. Mon cerveau craque, je tombe dans les pommes d’angoisse. Les pompiers viennent me chercher, je me suis fais dessus et tout le monde l’a vu. De là, je vois une quinzaine de médecins dans tous les hôpitaux et cliniques possibles autour de ma région. Suspicion de maladie de crohn, rectolite inflamatoire, méléna, tumeur endocrine, maladie caeliaque, thyroïde, tout y passe. Mais tout est négatif. Je ne fais pas de lien avec l’endométriose car je ne souffre plus depuis 2 ans. Il m’aura fallu 10 mois pour avoir un diagnostique. 10 mois de fuites anales, de pertes de conscience, de douleurs, de brûlures. Mais aussi de 10 mois de « c’est dans ta tête » « arrête de te focaliser dessus » « va voir un psy » « t’as toujours quelque chose »… il n’y a que mon mari qui me soutient et qui subit la maladie avec moi. 10 mois de canapé, car je ne veux plus dormir avec mon mari car je ne me contrôle plus, 10 mois d’enfermement car j’ai peur de me « lâcher » devant quelqu’un. Et puis le Dr P***l me reçoit rapidement après un mail de désespoir. Un simple contrôle suffit. Ma colonne vertébrale n’est plus droite. il y a une contracture des releveurs, une sensibilité vésicale, une douleur du cul de sac latérale gauche, une perte de la mobilité utérine, une douleur nette à la pression de l’utérus qui entraine une forte envie d’aller à la selle et une douleur périnéale  droite à la pression qui se répercute en fosse iliaque gauche. Dans le contexte d’une endométriose, j‘ai  une atteinte neurologique des racines sacrées S2S3 soit par engainement fibreux soit par infiltration endométriosique. 

Il ne veut pas m’opérer tout de suite car il préfère essayer un traitement d’abord. Je suis sous endrocur, estreva, lyrica, et 4g de paracetamol + codoliprane. Il me déconseille une nouvelle grossesse pour le moment, mon état ne le permets pas. Il ne sait même pas si j’aurai des problemes pour être enceinte de nouveau. Je plane toute la journée, je me pisse dessus, je passe les 3/4 de ma journée au lit, et je pleure pour rien. Il me demande de faire une demande d’ALD et de statut handicapé, mais je n’y crois pas. Je ne crois plus trop en quoi que ce soit d’ailleurs. Je viens de recevoir une ordonnance pour faire un test urinodynamique pour mon incontinence urinaire. Mais je ne peux plus prendre la voiture, mes médicaments me zombifie. Alors mon mari passe ses week end à faire le chauffeur. Je reste enfermée chez moi, je maigrie, je m’éteins. Je n’ai que 27 ans, et je ne me contrôle plus, je dépend des autres, et je suis fatiguée. Mon médecin généraliste ne veut plus me faire d’arrêts. Il a peur des retombées avec la sécu. Je suis chargée de recrutement collectifs, et je me ch** dessus. Alors si je suis toujours malade le 21 janvier, je devrai faire un abandon de poste car mon arrêt ne sera pas renouvelé. Je suis payé à 50% depuis 10 mois car je n’avais pas un an d’ancienneté. Entre mon misérable salaire, et les dépenses liées à la maladie, il n’y aura pas de Noël cette année.

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